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L’Union européenne tentée de baisser le niveau de protection du loup

Le loup, qui opère depuis une vingtaine d’années un retour remarquable en Europe, doit-il continuer à être strictement protégé ? La Commission européenne a donné fin décembre le coup d’envoi d’un processus qui pourrait aboutir, d’ici plusieurs mois voire plusieurs années, à réviser à la baisse le niveau de protection de l’espèce. Un changement de statut réclamé de longue date par les organisations agricoles et par certains pays, en raison des dommages causés aux élevages par ce prédateur : la France, notamment, s’est déjà dite favorable à un changement de statut et souhaite que l’Union européenne (UE) « avance vite » sur le dossier. Très inquiètes, les associations de protection de l’environnement dénoncent de leur côté une initiative sans fondement scientifique et aux conséquences potentielles encore difficiles à évaluer.
A la surprise générale, Ursula von der Leyen, la présidente de la Commission, avait mis sur la table en septembre 2023 l’idée d’une possible révision du statut du loup, « strictement protégé » (annexe 2) dans le cadre de la convention de Berne depuis 1982. Le 20 décembre, elle est passée des paroles aux actes en proposant formellement au Conseil de l’UE de ne faire du loup qu’une espèce « protégée » (annexe 3). Ce changement, s’il était adopté, ouvrirait la voie à une modification de la directive européenne « Habitats », qui découle de la convention.
Lancée à six mois des élections européennes de juin 2024, cette initiative s’inscrit dans un contexte de vive bataille politique se cristallisant sur les sujets environnementaux, et particulièrement agricoles. « La présidente von der Leyen sacrifie délibérément des décennies de travail de conservation pour son propre profit politique, faisant écho aux tentatives de ses alliés politiques d’instrumentaliser le loup comme bouc émissaire des problèmes socio-économiques des communautés rurales », a dénoncé Sabien Leemans, chargée des questions de biodiversité au bureau politique européen du Fonds mondial pour la nature (WWF).
Membre du Parti populaire européen (droite), Ursula von der Leyen pourrait être candidate à un deuxième mandat après les élections. Au printemps 2023, la loi sur la restauration de la nature avait déjà suscité une opposition frontale des conservateurs du PPE alliés à l’extrême droite, désireux de donner des gages au monde agricole et rural. « C’est exactement la même histoire pour le loup, estime Sergiy Moroz, responsable biodiversité au sein de l’ONG Bureau européen de l’environnement. Ursula von der Leyen est sous pression et envoie un signal à sa famille politique, en prenant une décision qui n’est basée ni sur la science ni sur l’opinion publique mais sur un agenda populiste de court terme. »
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